À peine créé, l’Appeals Centre Europe déjà critiqué pour ses liens avec Meta
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L'Appeals Centre Europe a annoncé sa création au début de cette semaine. Il doit traiter les litiges entre les utilisateurs européens et les plateformes, à commencer par Meta, TikTok et YouTube. Mais, ses liens avec Meta posent question sur l'indépendance de ses décisions.
Le 11 octobre à 14h47
5 min
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Mise à jour le 11 octobre à 18h20 : ajout de la réponse de l'autorité irlandaise Coimisiún na Meán
Comme nous l'évoquions mardi dernier, l'Appeals Centre Europe a été créé en Irlande pour traiter les conflits entre les utilisateurs européens et les plateformes. Organisme extrajudiciaire de règlement des litiges, il vient donc d'être certifié par l'autorité irlandaise de régulation des médias (la Coimisiún na Meán), en vertu de l'article 21 de la loi européenne sur les services numériques (DSA).
Il a donc maintenant l'autorisation de recueillir les doléances des utilisateurs des différentes plateformes. Son site ne permet pas encore d'envoyer quelque plainte que ce soit, et n'est pour l'instant utilisable que pour s'abonner à sa newsletter.
L'Appeals Centre Europe affirme qu'il va commencer en cette fin d'année par prendre en charge celles émanant des utilisateurs de Facebook, YouTube et TikTok mais qu'il étendra petit à petit son terrain à d'autres plateformes dès l'année prochaine.
Euractiv explique qu'Appeals Centre Europe est une société basée à Dublin et immatriculée en Irlande depuis juin dernier.
Un mécanisme déjà mis en place depuis 2020 par Meta aux États-Unis
Cette fois-ci, l'Europe reprend une façon de réglementer déjà en place aux États-Unis où, en effet, il existe déjà un « Oversight Board ». Celui-ci a été créé en 2020 par Meta alors que l'entreprise faisait face à beaucoup de critiques. Mais, comme l'explique le Washington Post, cet organisme américain piloté par Meta et composé de journalistes, d'analystes et d'experts fait aussi face à des reproches de lenteur de traitements des cas litigieux.
En juin, le média américain indiquait que Meta essayait vainement de trouver d'autres partenaires financeurs et a « menacé en privé de retirer son soutien, poussant le comité à réduire ses coûts ou à chercher de nouvelles sources de revenus ». Ce comité a bien tenté d'approcher d'autres entreprises comme YouTube, TikTok et Pinterest mais celles-ci ont refusé, ne voulant pas s'associer à la mauvaise réputation acquise autour de 2020 par le groupe qui possède Facebook.
Un financement de départ par Meta
Selon l'article 21 du DSA, cet organe de règlement extrajudiciaire des litiges doit notamment être « impartial et indépendant, y compris financièrement indépendant, des fournisseurs de plateformes en ligne et des destinataires du service fourni par les fournisseurs de plateformes en ligne, y compris des particuliers ou des entités qui ont soumis des notifications ».
Pourtant, le CEO de l’Appeals Centre Europe, Thomas Hughes, travaillait depuis 2020 et jusqu'en septembre dernier pour l'Oversight Board de Meta, après avoir dirigé pendant des années l'ONG de défense des droits de la liberté d'expression Article 19.
Il explique d'ailleurs à Euractiv que le nouvel organisme européen a reçu 15 millions de dollars (13,7 millions d’euros) sous la forme d’une subvention « unique, non remboursable et non renouvelable » de la part de l'Oversight Board.
Comme nous le soulignions aussi mardi dernier, les trois premiers administrateurs que sont Cherine Chalaby (qui fut président du conseil d’administration de l'ICANN), Catherine O’Regan (professeure de droits humains et ex juge à la cour constitutionnelle d’Afrique du Sud et à la Cour suprême de Namibie) et Marie Wieck (une ancienne dirigeantes d'IBM), sont aussi des membres de l’Oversight Board de Meta.
Une situation transitoire selon Thomas Hughes
Interrogé par Euractiv sur le fait que l’Appeals Centre Europe ne possède pas encore de directeurs non exécutifs sans lien avec Meta, Thomas Hughe a répondu : « nous avons besoin d’une certification pour embaucher le personnel, pour intégrer les nouveaux directeurs non exécutifs ». Il affirme que son organisation est une entité distincte de Meta, dotée de « politiques très strictes en matière de conflits d’intérêts », et qu’il n’existait pas de relation de financement permanente.
Next a cherché à interroger l’Appeals Centre Europe et la Coimisiún na Meán sur cette question. Le site du nouvel organisme ne proposant ni formulaire de contact ni email, nous avons contacté l'Oversight Board. Nous ne manquerons pas d'actualiser cet article avec leur réponse le cas échéant.
La Coimisiún na Meán assure que la certification a été accordée « à la suite d'une évaluation approfondie et solide de leur candidature ». Elle estime que « les processus et procédures en place ainsi que les mesures d'atténuation mises en œuvre par l’Appeals Centre Europe sont suffisants pour démontrer le respect de la condition d'indépendance ». L'autorité assure qu'elle contrôlera le respect des conditions de certification et rappelle qu'elle a le pouvoir de la révoquer si elle « détermine qu'un organisme certifié pour les organismes extrajudiciaires de règlement des litiges n'a pas respecté les exigences de chaque condition de certification ».
À Euractiv, Thomas Hughes affirme : « J’ai l’impression qu’il est plutôt correct que les plateformes technologiques assument la charge de la mise en place de ces organismes, parce qu’ils nécessitent beaucoup de ressources. »
Il assure que le financement par l'Oversight Board de Meta n'est destiné qu'au lancement de la structure et que l’Appeals Centre Europe, qui n’est pas « à but lucratif », s'appuiera ensuite sur le paiement de cotisations nominales. L'utilisateur déposant une déclaration devra payer 5 euros (prévue par le DSA et remboursée si la décision est favorable) et les entreprises 95 euros par dossier.
À peine créé, l’Appeals Centre Europe déjà critiqué pour ses liens avec Meta
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Un mécanisme déjà mis en place depuis 2020 par Meta aux États-Unis
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Un financement de départ par Meta
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Une situation transitoire selon Thomas Hughes
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